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24 mai 2020

Deux poèmes d'Alain Veinstein

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Une chance

Enfant, toujours, je vivais
dans l'imminence de la mort ;
pas d'autre attente, finalement,
quel que soit le cas de figure,
mais l'espoir, malgré tout,
que la mort me laisse une chance,
qu'elle soit, si je puis dire,
bonne joueuse,
qu'elle ne s'abatte pas sur moi,
d'un instant à l'autre,
comme une force écrasante,
sans même me laisser le temps
de pousser un cri :
vivre sa vie, au fond,
ce n'était peut-être pas trop demander.

 

 

 

 

 

 

Si j'ai écrit le mot fin,
c'était dans un moment de désarroi.
J'avais l'impression que toutes mes phrases
formaient un noeud autour de mon cou.

En fait, chaque mot écrit
fait tomber le silence.
Chaque mot se mue
en un autre mot,
et ainsi sans fin :
il y a le bois
et l'odeur du bois après la coupe.

Sans fin, quels qu'ils soient,
les mots se tournent vers des lèvres inconnues.
Exemple : ma façon, aujourd'hui,
de prononcer mon nom,
comme si je ne me connaissais pas.

Ce qui me requiert,
c'est ce qui bouge encore quand tout est fini.

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