On voit Aragon

De Louis Aragon, les éditeurs célèbrent l’anniversaire du décès en cette fin d’année. Ré-éditions, spectacles, hommages vont se succéder. Est-ce parce qu’on aime les poètes morts ? Ou parce que ses poèmes sont encore à découvrir ? Je choisis la seconde option. 

Voici, publié dans le recueil intitulé Les yeux d’Elsa (éd. Seghers), le poème Fêtes galantes :

On voit des marquis sur des bicyclettes
On voit des marlous en cheval-jupon
On voit des morveux avec des voilettes
On voit des pompiers frôler les pompons 

On voit des mots jetés à la voirie
On voit des mots élevés au pavois
On voit les pieds des enfants de Marie
On voit le dos des diseuses à voix 

On voit des voitures à gazomètre
On voit aussi des voitures à bras
On voit des lascars que les longs nez gênent
On voit des coïons de dix-huit carats

On voit ici ce que l'on voit ailleurs
On voit des demoiselles dévoyées
On voit des voyous On voit des voyeurs
On voit sous les ponts passer des noyés

On voit chômer les marchands de chaussures
On voit mourir d'ennui les mireurs d'œufs
On voit péricliter les valeurs sûres
Et fuir la vie à la six-quatre-deux

Ce sont des quatrains. Il n’y a pas de ponctuation. Chaque vers est un décasyllabe et commence par une anaphore, « On voit », sauf le dernier qui commence par « et fuir », et c’est une invitation.

Mais je ne vous invite pas à fuir. Je vous propose plutôt de composer au moins un quatrain (ou plus si vous le voulez) selon les principes suivants :

Chaque vers commencera par « On » + un verbe dont l’initiale est la lettre « v » suivie d’une voyelle dans l’ordre de l’alphabet (« va- »  pour le premier vers, « ve- » pour le deuxième, « vi- » pour le troisième, « vo- » pour le quatrième). Si vous poursuivez au-delà de ce premier quatrain, vous reprenez cet ordre.
Le nombre de pieds devra être égal d’un vers à l’autre, soit octosyllabes, soit décasyllabes, mais pas alexandrins.
La rime n’est pas obligatoire même si, parfois, elle sert le rythme.

Exemple :

On va seul par les chemins de l’automne
On veut ramasser quelques feuilles d’or
On visite les champs les bois leur faune
On voudrait simplement être dehors

C’est à vous main tenant. Célébrons Aragon qui, dans le même recueil, écoute les oiseaux chantant « Contre la poésie pure ».

Merci de poster votre quatrain (ou vos quatrains) dans les commentaires ci-dessous.

Comments

[Ann O Nyme]

On va de jardin en jardin

On versifie une folie

On vibre à Faux et c'est ainsi

On vole au vent des mots mutins



Et on écrit une autre Aragonade

(Festival La folie ,les mots Faux la Montagne (23) dernière semaine de Juillet)



Rien n'est jamais acquis au peuple, ni ses droits

Ni la justice, ni l'avenir Et quand il croit

Décider de demain on lui vole ses choix

Et quand il croit porter l'idéal, il le noie

Les urnes sont une vieille et souriante arnaque

Il n'y a pas de vote heureux.



Sa voix, elle ressemble à ses paroles creuses

Qu'on avait habillé de promesses foireuses

A quoi peut bien servir ce triste bulletin

Ceux qu'on retrouve au soir dépouillés, incertains

Dites démocratie, et retenez vos (l)armes

Il n'y a pas de vote heureux



Ma belle idée, ma chère idée, révolution

Respire au fond de moi malgré les trahisons

Et ceux là sans savoir nous forcent à renoncer

Récupérant les mots que nous avions tressés

Fauchant les utopies, tranchant les poings dressés

Il n'y a pas de vote heureux



Le temps d'imaginer, il est déjà trop tard

Que s'abstiennent les voix qui pleurent notre chanson

Ce qu'il faut de combat pour une compromission

Ce qu'il faut d'énergie pour que perce un bourgeon

Ce qu'il faut renoncer pour élire un bouffon

Il n'y a pas de vote heureux



Il n'y a pas de choix qui ne soit frustration

Il n'y a pas de choix dont on ne soit déçu

Il n'y a pas de choix dont on ne soit exclu

Et pas plus que d'un chef le choix d'un idéal

Il n'y a pas de choix qui ne soit corrompu

Il n'y a pas de vote heureux

Mais c'est notre vote peureux



Ann O Nyme

[eva]

On valse, des débris dessous les pieds

On végète, tempête contre temps

On vide les sorts gorges oïdiées

On voile nos paupières d'ossements



On vagabonde, dans des ruines, tombe

On végète, vexille bleu au vent

On vicie des brulures plus atones

On voue des heures rebus, et dément



On vacille, des bris dessous les pieds

On verdit tels des fossiles silant

On virole, fouge en terres caveaux

On volcanise méandres aux pieds



On vaque des méandres sous les pieds

On veille des méandres dans les cendres

On vielle des méandres scolopendres

On voile des méandres de mémoires



On vaguera seul dans le noir

[Isabelle]

On va là où le vent nous pousse

On veut profiter du soleil

On vient s'allonger sur la mousse

On voit un avenir vermeil.

[Victoria]

On vapôte des volutes sucrés

On veille à l' amitié les soirs d'été

On vilipende encor les réfractaires

On voue aux gémonies les libertaires !

[micheline]

On vacille déjà dessus nos bases

On veut tout et aussi tout son contraire

On vivote dans cette vie de naze

On voudrait réellement changer d'air.