Kouam Tawa chez l'Ours et la Vieille Grille, à Paris

C’est à Vitry-sur-Seine que j’avais rencontré Kouam Tawa ; il présentait Nimrod au cours d’une soirée Partage organisée par le Théâtre Jean Vilar au Centre social Balzac.

Dans la soirée à L’Ours et la Vieille Grille, à Paris, il présentait ses textes publiés dans un recueil intitulé Elle(s) chez Lanskine.

C’est le chant d’une femme, fait du chant de toutes les femmes que Kouam a écoutées dans son village du Cameroun, des chants de colère, d’espoir, de douleurs, de volonté…

Certains textes commencent par « J’aurais aimé », exprimant des regrets et des espoirs. D’autres témoignent de situations, de mauvais traitements, de relations peu satisfaisantes : « Je suis la fin de mon histoire », peut-on y lire.

Un texte, le plus long de tout le recueil, montre une femme portant dans ses bras un enfant malade et demandant de l’aide sur son chemin jusqu’à l’hôpital et dans les couloirs de l’hôpital, en vain puisque tous ont à faire et trop de malades attendent déjà des soins.

Chaque texte est introduit, alternativement, par « Ici Elle chante (et son chant est parole) » ou « Ici Elle parle (et sa parole est chant) ».

Le poète fait preuve d’une grande écoute et d’un grand respect. La plupart de ces textes pourrait concerner des femmes d’autres villages, d’autres pays…

Voici trois extraits :

Ici Elle parle (et sa parole est chant)

J’aurais aimé savoir parler. Avoir des mots au bout des lèvres. Avoir
réponse à toute question. Pouvoir dire ce que je veux dire. Pouvoir
traduire ce que je pense.

J’aurais aimé savoir parler. Dire « voici mon avis sur ceci », « voilà
mon idée sur cela ». Causer longtemps sans dire grand-chose.
Causer un peu et dire beaucoup. J’aurais aimé savoir parler. Dire
 sans que ma parole trahisse ma provenance. Et me mette à nu.

(…)

Ici Elle chante (et son chant est parole)

J’ai passé la journée à laver les habits de toute la famille et passé
la soirée à mettre de l’ordre dans la maison. Je n’ai plus aucune
force et vais prendre à l’aube le chemin de la plantation. — Écarte !
— Puisqu’il en est ainsi, prends au moins une douche pour atténuer
l’odeur de la bière ; elle me donne la nausée.

(…)

Ici Elle parle (et sa parole est chant)

J’aurais aimé être une chanson. Chanson de jour. Chanson de nuit.
Chanson de joie. Chanson de peine.

J’aurais aimé être une chanson. Chanson de terre. Chanson de mer.
Chanson de ciel. Chanson de vent.

J’aurais aimé être une chanson comme certains sont des livres et
d’autres des tableaux, comme certains sont des arbres et d’autres
des chemins.

(…)