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17 mai 2016

Épître Langue Louve, de Claude Ber

epitrelanguelouve

« Un besoin de lumière », sans doute parce qu’on « n’écrit pas dans le noir ». Ces deux extraits encadrent le texte de Claude Ber. Il faut donc croire que tout le livre est quête de lucidité. Une quête d’amour. Tout ensemble pensée et action, tout ensemble corps et esprit, tout ensemble l’intime et le monde. « L’esprit prononcé à fleur de peau ». Mais il n’est pas question de surface : ça creuse aussi. Tantôt pour exhumer l’oiseau mort, tantôt pour goûter « le fourré et l’herbe d’entrejambe ». Et quand elle dit le monde, c’est du langage qu’elle parle, de tous les langages, y compris « l’inconjugable verbe mourir du gabonais ». Claude Ber écrit en forme de dialogue une lettre en plusieurs fragments, car la langue se fragmente à vouloir tout dire. Orphée peut-être apaise les loups et les lions qui viennent « lécher à sa main le son de la parole », la langue dans la bouche, « toute chair à l’ouvrage », « la bouche à mordre et à baiser ». Il y a du vent, il y a « la pluie distraite dans son penché », il y a des odeurs « d’anis et de pistache », une île où la parole est coupée par intermittence dans le portable, une île où « une vieille femme tresse des sacs de plage. Elle ne parle pas la langue d’ici et glisse la sienne entre pouce et index pour mouiller le fil ». Voilà, il suffit de poser « la corbeille d’abricots sur la table ». Tout le réel surgit. Voilà, « à l’entrelacs des mains on voit / l’aimer sans mot au doux des doigts », « les mains meurtries et meurtrières ». 

Il y a beaucoup d’animaux dans ce livre, puisque nous en sommes. Et des étoiles, puisque nous sommes faits de leurs poussières. Et Orion est un chasseur.

Je lisais ce livre sur un quai de gare. Dans la vitre de la salle où j’attendais le train, un fantôme de pigeon s’est reflété, se posant sur le toit bien réel de l’autre côté et puis a disparu. Le train est arrivé. Les plumes du pigeon sont retombées sur les voyageurs. 

J’ai découvert ce texte dans la lecture à deux voix (Claude Ber et Frédérique Wolf-Michaux qui avait ouvert la soirée) qui en a été faite dans les locaux de la Compagnie Résonances, à Paris. D'autres livres de Claude Ber sont présentés ici et ici.  

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