L'annonce, de Marie-Hélène Lafon

Paul et Nicole, frère et sœur aînés d’une fratrie de sept enfants, placés par leurs parents autour de leurs seize ans chez deux oncles célibataires, agriculteurs dans le Cantal. Aujourd’hui âgé de quarante six ans, Paul passe une annonce pour trouver une femme. Celle qui répond s’appelle Annette ; elle a un fils, Eric ; elle est séparée du père de cet enfant proche de ses dix ans ; la mère et le fils vivent dans le Nord, à Bailleul, non loin de la mère d’Annette.

Voilà pour la situation. Mais le livre de Marie-Hélène Lafon, L’annonce, n’est pas du tout écrit sur ce ton. Le langage est recherché, juste ce qu’il faut, pour ne pas tomber dans une idéalisation de la France rurale, pour éviter une trop grande empathie et pour que travaillent les mots comme travaillent la terre, l’étable, le jardin. Les odeurs ne manquent pas, les saisons impriment leur autorité sur le paysage, la campagne et ses habitants, sans marquer de franche hostilité, ne sont pas aussi accueillants qu’on le prétend parfois. Une étrangère au village, à la ferme de Fridières, doit trouver elle-même sa place. On ne l’aidera pas. Mais pour Annette cette nouvelle vie est à saisir avec humilité et avec détermination. Et Eric a une belle amitié avec le chien, une belle aisance avec le troupeau.

Toujours la vie pousse dans ce livre malgré tout, malgré le passé d’Annette, son premier homme alcoolique et violent, les frustrations de Nicole, l’absence affirmée de perspective pour la ferme. Passé, présent et avenir ne provoquent guère d’enthousiasme. Et pourtant, la tarte aux pêches fraîches se laisse manger, la vieille Dyane roule encore sur les routes du Cantal. Et le journal (La Montagne) passe de mains en mains, satisfaisant toute la maison, les vieux oncles à l’affût des nouvelles locales, Nicole de l’actualité mondiale dans sa méfiance des infos du 20 heures télévisées, Paul pour terminer sa journée de travail, et les nouveaux, Annette et Eric, pour les mots croisés et pour l’usage du dictionnaire dont la reliure doit être renforcée régulièrement par la grand-mère d’Eric qui lui manque.