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20 janvier 2010

Justine, de Lawrence Durrell

quatuordalexandrieLe quatuor d’Alexandrie, ce sont quatre noms : Justine, Balthazar, Mountolive et Cléa ; quatre livres publiés entre 1957 et 1960, quatre points de vue sur une série d'évènements. 1000 pages dans une édition « Livre de poche » collection Classiques modernes.

Je viens de lire Justine, le premier livre. Le plaisir que j’ai éprouvé à la lecture n’a pas fait de moi un dévoreur de ces pages. J’y revenais volontiers mais sans me presser. Quelqu’un m’a dit que ce livre ne m’attendait pas.

Lawrence Durrell décrit une ville, ses beaux quartiers où se multiplient les réceptions, les cocktails parties (« inventées par les chiens. Ce n’est rien de plus que l’habitude de se renifler le derrière élevée au rang d’institution mondaine. »), ses quartiers mal famés où il ne faut pas aller seul, les relations entrecroisées d’une société où l’espionnage le dispute à la Cabale (qui écrit ses messages en boustrophédon !)…

Et c’est une histoire d’amour complexe, sexuelle, sociale et intellectuelle. Le narrateur, Justine, Melissa, Nessim, et autour d’eux, Pombal, Mnemjian, Capodistria et d’autres… Les histoires se croisent, la chronologie se défait et se reconstruit (« je dois rapporter les faits, non dans l’ordre chronologique – car cela c’est de l’histoire – mais dans l’ordre où ils prennent une signification pour moi »), le narrateur (qui n’est pas l’auteur, est-il précisé en préface) compose son récit à partir de ses souvenirs, du journal de Justine, d’un livre publié par le premier amant de Justine (intitulé Mœurs), et tout s’emboîte. C’est cet emboîtement qui m’a beaucoup plu, et les descriptions de la ville (« Cinq races, cinq langues, une douzaine de religions ; cinq flottes croisant devant les eaux grasses de son port. Mais il y a plus de cinq sexes, et il n’y a que le grec démotique, la langue populaire, qui semble pouvoir les distinguer »), les paysages fouillés comme les rues qu’on fréquente (par exemple, ces « notes pour un paysage… Longs accords de couleur. Lumière filtrée par l’essence des citrons. Poussière rougeâtre en suspension dans l’air… »), du lac Mareotis où aura lieu une chasse à l’aube décisive.

Et des phrases un peu sentencieuses. En voici deux : « Je me rends compte que ce que les autres savent de nous se réduit à un seul aspect, particulier, de notre caractère. » - «  A chaque stade de son développement, l’homme résume tout l’univers et l’adapte à sa propre nature intérieure, tandis que chaque penseur, chaque pensée féconde à nouveau l’univers tout entier. » Mais je pourrais en citer d’autres, aussi définitives, sur l’amour, les femmes, les relations sociales. Ce goût de la formule est à la fois excitant et, à mes yeux, ancré dans le milieu du XXe siècle.

Je vais rendre à la Médiathèque le volume du Quatuor d’Alexandrie en me disant qu’il me faudra l’emprunter à nouveau pour explorer les livres suivants. Et retrouver cette ambiance de secrets, de violence, de légèreté, de profondeur, la moiteur de la ville (« Alexandrie capitale de la Mémoire ») et la poésie de Cavafy, poète qui accompagne ici l’écriture de Lawrence Durrell.

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