Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
main tenant
6 août 2014

Noir de boue et d’obus, à Avignon

noir-de-boue-et-d-obus-photo-denis-guichot

La guerre est partout. Dans les journaux, les commémorations, les jeux. Les images de guerre nous sont quotidiennes. Comment rendre compte de l’horreur, des combats, des fraternités, de la folie, de l’isolement, des inégalités préservées entre les classes, les origines, du quotidien au ras du sol, creusant, rampant, des injustices « au nom du peuple français » ? La Compagnie Difé Kako a choisi de décaler le regard sur la guerre 1914-1918. Les poilus sont trois femmes et un homme ; la couleur de peau ne définit pas le tirailleur ; les soldats sont parfois des infirmières ; l’ombre portée sur le mur du fond de scène en fait parfois des fantômes ; « je rigole maintenant, parce que je sais que là-bas je vais mourir ». Les pas sont martelés, cadencés, cela donne l’uniformité, mais du défilé permanent (celui-là même que Bardamu décide de suivre au début du Voyage au bout de la nuit) vont sortir tantôt l’un tantôt l’autre, avec sa propre danse, avec son délire, soit debout, soit couché. Et c’est peut-être là que réside la force de ce spectacle. Généralement, les danseurs de Difé Kako sont debout sur la terre qu’ils frappent de leurs pieds. Ici, ils tombent, roulent, plantent leurs deux poings pour avancer le corps. La guerre change le rapport au corps. On n’oublie pourtant pas le jeu qui réunit, on n’oublie pas les couleurs du drapeau qu’on partage, on n’oublie pas la lutte, ce sport qui permet le corps à corps. A la fin, les visages sont marqués, les corps ont transpiré, la guerre retentit comme des rires saccadés qui montent et déferlent et reviennent et repartent. Et puis tu es seul, au milieu de nulle part, on te décore et on te salue, ancien combattant, tirailleur sénégalais.

Chorégraphie : Chantal Loïal. Assistante chorégraphique : Julie Sicher. Interprètes : Julie Sicher, Mariama Diedhiou, Louise Crivellaro et Alseye N'dao. Bande-son et composition : Pierre Boscheron. Création lumière : Stéphane Bottard.

J’ai vu ce spectacle à Paris, lors de sa création. Je l’ai revu au Théâtre Golovine (photo Denis Guichot), à Avignon, en juillet.

Commentaires
main tenant
main tenant
Derniers commentaires