Intérieur, de Thomas Clerc

Thomas Clerc choisit de ne pas s’écarter de la réalité, de ne pas mentir, ce qui ne signifie pas de tout dire ou tout écrire. Il s’attache à décrire son environnement, l’endroit où il vit, ici un appartement dont il dit qu’il va le quitter quand il aura fini cette visite guidée. Est-ce un roman ? Parfois, ouvrir un tiroir lui fait écrire le début d’un récit. Si un roman est une narration, ce pourrait être le début d’un roman. Mais c’est encore autre chose. Si « un roman, c'est un miroir qu'on promène le long d'un chemin », comme l’écrivait Stendhal, alors Intérieur est un roman. Mais c’est plus que cela. C’est une forme d’autobiographie, pas un journal, peut-être une sorte de témoignage. Une autobiographie attachée à un lieu et qui le déborde avec des souvenirs qu’un meuble rappelle, des noms comme des balises posées dans certains endroits. Une autobiographie qui le distingue de la mienne (que je n’écris pas) et dans laquelle je trouve des éléments en commun, comme ce Dictionnaire encyclopédique de la langue française, dont il manque, chez moi aussi, le dernier volume. Ou encore ce masque neutre qui apparaît dans son inventaire, qui me fait penser au visage aimant, réalisé par Agathe Bézault et fixé sur un côté de mon réfrigérateur. 5O mètres carrés, 3 ans d’écriture, pour lui, plusieurs jours de lecture presque quotidienne pour moi. L’édition en livre de poche compte 412 pages (plus le sommaire). Elle déforme sans doute un peu l’édition originale puisqu’à la page 253, on peut lire : « ici même, à la page 236 d’Intérieur ». Ce léger décalage ouvre sur une possible déformation spatiale. Le livre est autre chose que le lieu. On peut l’ouvrir, le parcourir, même si on n’y est pas. Et c’est à l’extérieur, dans les transports en commun, que j’en ai lu le plus grand nombre de pages. 

Thomas Clerc est né un 27 avril (c’est écrit page 328 de l'édition de poche). C’est pourquoi cet article est publié un 27 avril.