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main tenant
2 mai 2012

La petite Juive, de Maurice Fanon

Je me suis réveillé un matin avec cette chanson en tête. Elle évoque les temps que François Godard rappelle dans ses Résistances. Parfois je me dis qu’elle nous parle aussi d’aujourd’hui. Ecoutez la à votre tour (en cliquant sur l’image ci-dessous).

 

mauricefanonDans ce monde borné de quel entre deux guerres
Où ceux qui font les lois les troussaient par derrière
Nous n'avions que cinq ans du pain sec au dessert
Pour cinq lettres de trop ou un pet de travers
On nous disait tu vois c'est la croix que Grand-Père
A gagné au Chemin des Dames et nos grands frères
Abandonnant le bleu pour un kaki douteux
Cocufiaient Madelon dans les bras de Marlène
Une fois l'an nous allions voir entre père et mère
La victoire en chantant nous ouvrir la barrière
Et nous nous en allions en suçant des bonbons
Jouer du revolver à deux sous le bouchon.

Et je me souviens la petite Juive
Elle me disait viens
Elle était jolie
On faisait des bêtises
Ou on ne faisait rien
Elle s'appelait Lise
Et je m'en souviens

Dans ce monde truqué de quelle drôle de guerre
Où ceux qui font le front le bradaient à l'arrière
Nous n'avions que dix ans et dans nos gibecières
Une histoire de France qui tombait en poussière
On nous a fait courir traverser des rivières
Sur des ponts d'Avignon qui dansaient à l'envers
Ça tirait par devant, ça poussait par derrière
Les plus pressés n'étaient pas les moins militaires
On nous a fait chanter pour un ordre nouveau
D'étranges Marseillaises de petite vertu
Qui usaient de la France comme d'un rince cul
Et s'envoyaient en l'air aux portes des ghettos

Et je me souviens la petite Juive
On lui a dit viens
Elle était jolie
Elle a fait sa valise
Un baiser de la main
Elle s'appelait Lise
Il n'en reste rien

Dans ce monde mort-né d'avant quelle autre guerre
Où le Japon blessé lèche encore son cancer
Dans ce monde sceptique où ceux qui ont la foi
Ne savent plus si Dieu est devant ou derrière
Dans ce monde d'argent où la banque surnage
Comme un poisson ventru qui attend le naufrage
Nous n'avons que trente ans sainte horreur de la guerre
Et pourtant nous n'avons pas cessé de la faire
On nous a fait marner de djebel en rizière
De Charybde en Scylla de cuvette en civière
Comme si nous n'avions pas autre chose à faire
Qu'à montrer nos fesses aux quatre coins de la terre

Et je me souviens la petite Juive
Elle me disait viens
Elle était jolie
On faisait des bêtises
Ou on ne faisait rien
Elle s'appelait Lise
Et je m'en souviens

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