Le lion en hiver, de James Goldman, par l'Artisanal Théâtre

Henri Plantagenêt et Aliénor d’Aquitaine ont marqué l’histoire européenne du XIIe siècle, et leurs enfants les premières années du siècle suivant. Cette famille s’est construite et déchirée sur un territoire allant de l’Irlande aux Pyrénées. Henri II et Aliénor sont enterrés à Fontevraud.

La rencontre imaginée par James Goldman a lieu quelques années avant la mort d’Henri, à Chinon. Dans un huis clos machiavélique, où chacun manipule les autres, nous sommes entraînés dans un extraordinaire jeu tactique où les positions se renversent sans cesse. Il y a une véritable jubilation dans le jeu des comédiens : Henri, sûr de lui, possède une expérience qui lui donne la plus grande habileté ; Aliénor n’est pas en reste et défend ses intérêts avec des armes féminines et royales ; Richard est impétueux et prêt à en découdre ; Geoffroy, calculateur, n’ambitionne que l’exercice du pouvoir, pas nécessairement le titre ; Jean, le plus jeune, persuadé d’être le préféré, trépigne ; et Philippe, jeune roi de France, apprend, dans cette confrontation avec ses hôtes à se faire des alliés et à pousser le plus vieux, Henri, à la faute ; Aloïse, maîtresse du roi, ne sera pas un simple pion sur cet échiquier, elle aura son mot à dire !

Référence est faite à Shakespeare, au roi Lear (dont l’action est antérieure à l’histoire des Plantagenêt), pour affirmer que le roi Henri II ne divisera pas son royaume entre ses fils. Et il faut bien avouer que nous pensons toujours à Shakespeare quand il s’agit au théâtre de l’histoire des rois d’Angleterre avant le XVIIe siècle. Mais ici, pas de meurtre, pas de suicide, seulement la parole, certes parfois assassine, qui noue et dénoue les liens complexes de l’ambition, des liens familiaux, de l’amour, du pouvoir.

Outre le jeu des comédiens de cette compagnie, l’Artisanal Théâtre, il faut signaler le dispositif scénique : un espace de jeu au centre du plateau, dans la lumière, et des chaises disposées à l’entour, dans l’ombre, si bien que les comédiens sont toujours présents, comme leurs personnages toujours agissant dans la lumière ou dans l’ombre. La simplicité apparente de la scénographie et des costumes permet au spectateur d’être au plus près de l’intrigue et de ne pas s’égarer dans la futilité d’accessoires et de décors qui risqueraient de perturber la compréhension d’une pièce dont les enjeux sont complexes comme peut l’avoir été la période historique à laquelle elle se réfère, quand la façade atlantique n’était pas gouvernée par le roi de France.

L'Artisanal Théâtre concourt pour le Masque d'Or, organisé par la FNCTA, et dont la finale doit avoir lieu à Aix en octobre. J'ai vu le spectacle dans le cadre des Rencontres Théâtrales de la MJC-Centre Social de Chilly-Mazarin (91)

photo Spiriciel - Festival des frères poussière