Jeu et Théorie du duende, de Federico Garcia Lorca
Le duende est indéfinissable. Federico Garcia Lorca, dans ce texte d’une conférence prononcée en 1933 et 1934, ne s’y risque pas. Il tente d’en faire saisir par d’autres moyens que l’intellect la nature. Et la démonstration est brillante, amusante même parfois, se référant sans cesse à des œuvres, qu’il s’agisse de poésie, de philosophie, de sculpture, de peinture, de musique, de danse, de tauromachie… Parce que le duende a quelque chose de la mort.
Garcia Lorca ne parle pas d’inspiration dans ce texte. Il affirme que le duende est à l’intérieur de l’artiste et que c’est là qu’il faut aller le chercher, dans des zones obscures, dangereuses, « dans les dernières demeures du sang ». Il l’oppose à l’ange, qui «guide et soigne», et à la muse, qui «dicte et, à certaines occasions, souffle». L’ange « tisse avec des larmes de glace et de narcisses l’élégie que nous avons vu trembler entre les mains de Keats ». La muse « encourage et quelquefois croque (les poètes) tout crus, comme ce fut le cas d’Apollinaire, grand poète détruit par l’horrible muse avec laquelle l’angélique et divin Rousseau le peignit ». On trouve parfois le duende chez Cézanne ou Nietzsche, mais c’est un génie espagnol, à l’œuvre dans le flamenco. Garcia Lorca note pourtant que « le duende ne se répète jamais ». Il n’est pas fait de technique, ni de formes mais de musique pure, tout savoir-faire étant appauvri.
« Le duende opère sur le corps de la danseuse comme le vent sur le sable. »