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main tenant
29 janvier 2010

Le père de mes enfants, de Mia Hansen-Løve

Le_pere_de_mes_enfantsDès la première image du film, Grégoire Canvel (Louis-Do de Lencquesaing) apparaît débordé : un téléphone à la main, un second sonne, il est dans la ville, dans la rue, parmi la foule, dans un tourbillon qui semble infini, un tourbillon qui ne s’arrête pas quand il monte dans sa voiture, qu’il gagne une maison de campagne près de Paris, ne lâche quasiment pas son téléphone… Parce que ça ne peut pas être autrement, parce que son humanité exige cela de lui : répondre aux autres, être attentif aux autres, à celles et ceux qui travaillent dans le bureau de la société Moon Films, sur les plateaux de tournage, en Suède, à sa femme et ses filles… Le film commence et les policiers qui arrêtent Grégoire pour un excès de vitesse lui annoncent qu’il n’a déjà plus de point sur son permis.

La dérive s’enclenche là. Il aurait peut-être pu tenir encore, peut-être fait face aux difficultés financières de sa société de production, peut-être pu raconter tranquillement l’histoire des Templiers ou décrypter les images du paradis (ou du jugement dernier) dans la nef des églises. Mais il est débordé de toutes parts. On le sait quand on va voir ce film, Grégoire se suicide un jour où sa solitude l’emporte sur le tourbillon, solitude où personne ne peut l’atteindre, solitude soudain radicale.

La caméra, ensuite, s’apaise. Des plans calmes de paysages, la grande tristesse des filles, sur le canapé, avec Serge (Eric Elmosnino), l’ami qui dit des choses simples et réconfortantes…

Et l’image va, à nouveau, s’accélérer, parce que la vie pousse toujours plus avant. Clémence (Alice de Lencquesaing), la fille aînée, s’intéresse à des films produits par son père ; elle change de statut, n’est plus seulement la fille aînée mais assume, endosse sa nouvelle responsabilité d’adulte, c’est le premier pas pour elle, les questions nouvelles à présent que son père n’est plus là et qu’il laisse à la postérité les films qu’il a soutenus, certes, mais aussi trois filles qui porteront son héritage.

Enfin, la dernière parole prononcée dans ce film, si je ne me trompe pas, est une réponse de Sylvia (Chiara Caselli), la veuve de Grégoire, à Clémence qui souhaite, avant de sortir de la capitale, passer au cimetière : « On n’a pas le temps. » Voilà : l’accélération a repris, le tourbillon qui semblait s’être apaisé les a rattrapées. Et la musique dit « Que sera sera… »

Ce film s'inspire de faits réels, le suicide d'Humbert Balsan, producteur de cinéma, mais j'ai aussi pensé à Kristina Rady, et les mots de Serge, dans le film, pourraient sans doute concerner celles et ceux qui se suicident : « Sa souffrance était si grande à ce moment là... »

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