Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
main tenant
10 juin 2009

Ecrire en pays dominé, de Patrick Chamoiseau - 3

De Glissant - Chamoiseau : abandonner les Territoires pour les Lieux

« Le colonisateur disposait des armes de sa victoire : une Nation-Territoire, une langue, une peau, une identité, un drapeau, une expansion dominatrice. En Afrique, en Asie, dans la Caraïbe, en Amérique latine, au mitan des Etats-Unis, nous lui opposions les mêmes ingrédients avec ses propres manières. »

Dans son « rêver-pays », Chamoiseau abandonne la notion d’Unicité et de Territoire au profit des notions de Divers et de Lieu qu’il trouve dans les écrits d’Edouard Glissant. « Le Lieu ne se perçoit qu’en mille histoires enchevêtrées ; le Territoire se conforte d’une Histoire. (…) Le Lieu se répercute en réseaux dans l’ensemble du monde ; le Territoire pose un Centre et des périphéries. »

rhizomeJ’ai pensé à ce moment à la notion de rhizome. Celle de Deleuze et Guattari, s’appuyant sur l’observation des rhizomes végétaux, tiges souterraines, généralement horizontales, de certaines plantes vivaces (comme l’iris) qui diffèrent d'une racine par leur structure interne, et en ce qu'ils portent des feuilles réduites à des écailles, des nœuds et des bourgeons, qui produisent des tiges aériennes et des racines adventives. Ces deux philosophes écrivaient en 1980 : « Le rhizome est une antigénéalogie. (…) A l’opposé du graphisme, du dessin ou de la photo, à l’opposé des calques, le rhizome se rapporte à une carte qui doit être produite, construite, toujours démontable, connectable, renversable, modifiable, à entrées et sorties multiples, avec ses lignes de fuite. Ce sont les calques qu’il faut reporter sur les cartes et non l’inverse. » (Mille Plateaux) 

Et aussi à cette réplique extraite de la pièce de Koltès, Le retour au désert : « Mes racines ? quelles racines ? je ne suis pas une salade », dit Mathilde

mursA partir de la réflexion qu’ils ont menée en commun, Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau ont publié en septembre 2007 (c’est-à-dire après la création d’un ministère de l’identité nationale en France) un texte aux Editions Galaade : Quand les murs tombent. On y lit : « La tentation du mur n’est pas nouvelle. Chaque fois qu’une culture ou qu’une civilisation n’a pas réussi à penser l’autre, à se penser avec l’autre, à penser l’autre en soi, ces raides préservations se sont élevées, effondrées, et nous reviennent encore avec de nouvelles stridences. (…) Le côté mur de l’identité peut rassurer. (…) Mais, indépendamment de tout vertueux principe, le mur identitaire ne sait plus rien du monde. (…) Les murs menacent tout le monde, de l’un et l’autre côté de leur obscurité. Ils achèvent de tarir ce qui s’est desséché sur ce versant du dénuement, ils achèvent d’aigrir ce qui s’est angoissé sur l’autre versant, de l’abondance. (…) Que tombent les murs. »

Commentaires
main tenant
main tenant
Derniers commentaires