Drôle de frousse
La peur a changé. C’est toujours la peur, mais ce qui effrayait les enfants du siècle précédent ne leur cause plus aucun tourment. Alors, qu’advient-il des ogres et des sorcières ? A présent qu’ils font rire. On les recycle ! On les enferme. On les parque.
Eux, ils n’ont qu’une idée en tête : faire peur une dernière fois. Oh certes, ils ne sont plus crédibles dans leurs costumes surannés, et la mémoire de l’ogre lui fait un peu défaut. Mais rien ne les empêchera de faire le mur, de s’enfuir sur le balai de la sorcière et d’atterrir sur le terrain de la tante de Nina.
Non, la peur n’a pas disparu. Au contraire, elle a pris des traits familiers et les monstres d’antan n’y peuvent pas grand-chose. Ils auraient d’ailleurs plutôt des côtés rassurants. Une sorcière ça offre une pomme empoisonnée ; un ogre ça mange de la chair fraîche. C’est simple, tout le monde sait ça.
Cette pièce, écrite par Nathalie Saugeon (auteur de théâtre et de scénarios pour le cinéma), et présentée par la Compagnie Les Globe Trottoirs, parle aussi bien aux enfants qu’aux adultes, et, si la question de la peur est centrale, c’est aussi celle de la vieillesse, de la perte. Car tous y perdent quelque chose et ce n’est qu’en acceptant cette perte que chacun réalise sa propre existence : passage de l’enfance, passage de la retraite, passage de la mort.
Et tout cela est très coloré, très joyeux. Au point que le public quittant la salle passe, lui aussi, de l’autre côté de l’arc-en-ciel.