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7 mai 2009

Un homme, de Philip Roth

unhomme«La force de continuer n’est rien d’autre que le courage d’en finir.» (Eric Chevillard)

On aurait pu mettre cette phrase en exergue du livre Un homme de Philip Roth. Mais, peut-être le refrain de Jacques Brel aurait-il mieux convenu : « Mourir, cela n’est rien / Mourir, la belle affaire / Mais vieillir, Ô vieillir ! »

Pour un homme (Everyman, chaque homme, comme le dit le titre original et comme l’évoque le personnage lui-même), « ce n’est pas une bataille, la vieillesse, c’est un massacre ».

Dans Mort d’un jardinier (voir dans ce blog, le 3 février), l’homme victime d’un malaise appelle ses souvenirs, fait défiler sa vie, ses lectures, ses amis, couché à même la terre, terrassé dans un moment où il est seul chez lui, mais il ne vit pas seul, il est encore actif, comme on dit, et une femme arrivera, une fois le livre refermé.

Ici, la mort n’est pas ce que l’on craint. Le personnage, comme l’auteur, est né en 1933, et, même s’il la raconte avec un esprit critique, il a bien vécu sa vie. Et c’est bien la sienne, pas celle de son frère, par exemple, ni celle de son ancien patron ou de sa seconde épouse. C’est la sienne dans le sens où il l’assume, où il en souffre parce qu’il aurait peut-être pu faire autrement. Mais, bien sûr, on ne peut rien changer de ce qui a été fait. Ce livre dit la conscience qu’un homme peut avoir de sa mort prochaine, et la conversation avec le fossoyeur (qui va transmettre son métier à son propre fils) est d’une belle concrétude. Il montre surtout l’expérience du corps humain, sa déchéance finale. Ne plus pouvoir nager dans l’océan comme il aimait à le faire, subir des hospitalisations répétées, perdre le goût de peindre, voir la douleur s’installer dans les corps, apprendre le décès d’un proche, puis d’un autre…

Il y a dans ce livre plusieurs passages dans un cimetière. Après Dans ma maison sous terre (voir dans ce blog, le 7 avril), j’ai lu, suivant les conseils pris sur le blog de Chloé Delaume, Vu du ciel, de Christine Angot, dont la plus grande partie a lieu sur une tombe. Et voici Un homme… Chacun à sa façon dit la nécessité de parler aux morts. Il y a aussi un peu de ça dans le film de Bertrand Tavernier que j’ai relaté le 5 mai. Je ne passerai pas ma vie dans les cimetières et je n’attends pas des morts qu’ils me disent, comme la mère dans le livre de Philip Roth : « Penche toi sur ton passé, répare ce que tu peux réparer et tâche de profiter de ce qui te reste. » Les morts n’ont pas de conseil à donner. Ils ne demandent rien. Nous, vivants, leur devons seulement de ne pas les oublier. « Le jours suivants, il lui suffisait de désirer assez fort leur présence pour qu’ils surgissent, non seulement les parents d’os de l’homme vieillissant, mais ceux de chair de l’enfant encore en bourgeon, qui partait en autobus à l’hôpital, avec L’Île au trésor et Kim, dans la mallette que sa mère tenait sur ses genoux. »

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