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27 janvier 2009

Les Chants de Maldoror

Mathias Langhoff met en scène, au Théâtre des Abbesses, les Chants de Maldoror, de Lautréamont. Mais comment traiter cette œuvre foisonnante, protéiforme, emportée, bouillonnante ? Le metteur en scène ajoute la vidéo, une image projetée sur un tulle qui se surimprime au plateau, et apporte de la confusion là où il y avait de l’emportement. Déception pour moi, parce que le texte s’affadit à être situé seulement dans l’histoire ou la sociologie. On n’entend plus les colères contre Dieu, le spectateur est égaré.

Encore deux mots : Lautréamont établit, dans un de ses textes, la liste de tout ce qui le révolte, liste très longue, qui n’en finit pas ; Langhoff choisit un procédé qui amène le spectateur à rire de cette liste ; que retiendra-t-on de cette révolte ? Et puis, Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, est mort à 24 ans ; choisir André Wilms pour porter ses mots, quelle que soit la qualité de son jeu, cela déplace le centre de gravité de l’écriture sans apporter, sauf peut-être dans la dernière scène (celle du vaisseau fantôme), cette nouvelle énergie qu’on pourrait attendre d’un texte proféré dans une salle de théâtre.

maldoror_Lisons un peu de Lautréamont : J’ai vu, pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leurs semblables, et pervertir les âmes par tous les moyens. Ils appellent les motifs de leurs actions : la gloire. En voyant ces spectacles, j’ai voulu rire comme les autres ; mais cela, étrange imitation, était impossible. J’ai pris un canif dont la lame avait un tranchant acéré, et me suis fendu les chairs aux endroits où se réunissent les lèvres. Un instant je crus mon but atteint. Je regardai dans un miroir cette bouche meurtrie par ma propre volonté ! C’était une erreur ! Le sang qui coulait avec abondance des deux blessures empêchait d’ailleurs de distinguer si c’était vraiment le rire des autres. Mais après quelques instants de comparaison, je vis bien que mon rire ne ressemblait pas à celui des humains, c’est-à-dire que je ne riais pas.

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